Pourquoi la France devrait annuler la vente des Mistral à la Russie

http://euromaidanpress.com/2014/07/26/why-france-should-cancel-the-mistral-deal-with-russia/

2014/07/26

 

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Par Guil Sho

Après la tragédie de la Malaysia Airlines, il devient de plus clair et plus clair pour la communauté internationale que la Russie joue un rôle actif dans la guerre contre l’Ukraine et soutient le terrorisme. Malgré cela, la France ne suspend pas sa coopération militaire avec la Russie et prévoit de livrer deux navires d’invasion avancée de la classe Mistral à la Russie. Nous vous offrons une analyse d’une affaire embarrassante contre laquelle des dirigeants mondiaux comme Obama et Merkel, ont pris position.

La vente des Mistral signée malgré l’expansionnisme de la Russie

La France a signé ce contrat malgré les preuves que l’expansionnisme russe déstabiliserait la région. En 2010, Galia Ackerman a interrogé Pavel FELGENGAUER, un expert militaire russe. Elle lui avait demandé s’il pensait qu’une opération militaire russe en Crimée a ététaité possible. Il a répondu qu’à son avis, même si la Russie le voulait, cela n’était pas encore possible. Il avait dit que pour que cette opération réussisse, non seulement la Russie devrait écraser l’armée ukrainienne, mais il lui faudrait également prendre contrôle de la région rapidement et sans violence et effusion de sang. Il a dit que ce devrait être un Anschluss. Selon lui, en 2010, la Russie n’avait pas les capacités militaires pour une telle opération. Mais, il a ajouté que la Russie aurait ces capacités une fois qu’elle aurait achevé sa réforme de l’armée, « dans 5 ou 10 ans ». Il avait également dit que l’annexion de la Crimée seule n’avait aucun sens et que la Crimée devait être prises avec Donetsk, Louhansk, Odessa et Kharkiv.

Dans cette interview, en 2010, FELGENGAUER avait déclaré que la Russie voulait acheter des navires Mistral afin de réaliser une telle opération contre l’Ukraine. Il avait dit que ces navires ne sont pas destinés à la défense, mais à l’attaque et seraient extrêmement utiles pour attaquer Odessa ou la Transnistrie et obtenir une victoire rapide.

Un an après cet interview, en 2011, 3 ans seulement après la guerre en Géeorgie et malgré les protestations de ses alliés historiques, la France a signé un contrat de vente à la Russie de deux navires de la classe Mistral, pour 1,2 milliards d’Euros, avec une option pour deux navires supplémentaires. C’était la première fois qu’un membre de l’OTAN avait accepté de livrer des équipements militaires sensibles à Moscou. Ce contrat couvre également les transferts de technologie, car les ingénieurs Russes travaillent avec des ingénieurs Français sur la construction du bateau. C’est le point le plus inquiétant, car après cet accord, les Russes seront en mesure de construire leurs propres navires d’invasion.

La livraison du premier navire, le Vladivostok est prévue pour octobre 2014. La livraison du deuxième navire, le Sébastopol, est prévue pour mi-2015.

Le Mistral est un navire d’assaut amphibie, conçu pour diriger les invasions de la mer à la terre. Le commandant en chef de la marine russe pendant la guerre de Géeorgie, a déclaré qu’avec ces navires, l’attaque contre la Géorgie aurait duré seulement 40 minutes et pas 26 heures comme ce fut le cas. Un Mistral peut transporter 16 hélicoptères, 4 navires de débarquement, 60 BTRs, y compris environ 15 chars, et jusqu’à 900 soldats. Il n’est pas seulement un navire de commandement avec un hôpital, comme les Français aiment à le décrire, mais une véritable arme stratégique capable de frappes importantes.

La situation actuelle

Quatre ans plus tard, la prédiction de Felgengauer est devenu une réalité : la Russie a annexé la Crimée et soutient la guerre dans le Donbass. Sur la radio française, il a été rappelé récemment que la Russie a acheté ces navires afin de les utiliser dans la mer Noire contre Odessa, ou dans le Pacifique contre les bases américaines ou le Japon.

En outre, au cours des dernières années, la Russie a ouvertement adopté une rhétorique expansionniste et anti-européenne, revendiquant des droits russes sur les anciennes républiques de l’URSS et présentant d’inquiétantes ressemblances avec la rhétorique de l’Allemagne nazie des années 1930.

De façon compréhensible, de plus en plus d’alliés expriment laurs préoccupations au sujet de ce contrat. Le Président Barack Obama a dit au Président Hollande qu’il pense que le contrat devrait être suspendu. Différents responsables de haut niveau de la Pologne et des pays baltes ont clairement dit que la France ne devait pas vendre ces navires. L’Ukraine, nouveau partenaire de l’Union européenne après la signature de l’accord d’Association, souffre à présent de l’invasion russe. Un avion civil a été juste abattu par la Russie qui soutient les séparatistes dans le Donbass.

La société civile exprime aussi constamment ses préoccupations. Le groupe d’activistes « Pas de Mistrals pour Poutine » organise des manifestations régulières dans le monde entier contre cet contrat et contre la coopération militaire française avec la Russie. La dernière série de protestations a été organisée autour du 14 juillet, avec des manifestations dans 18 villes et 13 pays. À Kiev, environ 300 manifestants se sont rassemblés à l’extérieur d’un musée où l’Ambassadeur Français organisait un banquet.

Les autres options

Les opposants à ce contrat suggèrent que la France pourrait trouver d’autres clients. Les sénateurs américains et canadiens ont suggéré que l’OTAN, les États-Unis ou le Canada devraient acheter ces navires.

Claudia Major et Christian Mölling, boursiers à l’Institut allemand pour les affaires internationales et de sécurité (SWP) ont proposé que l’Union européenne achète ces navires. Ils ont souligné que l’une des priorités du Président français est de construire une défense commune, et ils ont suggéré que ces deux navires pourraient devenir la première étape dans cette direction.

Avec un peu de créativité et de bonne volonté, il est donc possible de trouver des solutions alternatives pour ces navires. Cela peut coûter un peu d’argent (pénalités de résiliation du contrat), mais cela ne semble rien en comparaison de devenir l’allié d’un état totalitaire agressif comme la Russie de Poutine, et en comparaison avec la paix et la stabilité en Europe.

La France poursuit le contrat

Dans ce contexte, il est plus difficile de comprendre pourquoi la France n’a pas annuler cette vente. Jusqu’à présent, l’affaire va de l’avant, et 400 marins russes sont arrivés en France pour suivre une formation. Les médias et les politiciens n’ont pas commenté cela en détail. Le Front National, parti d’extrême-droite français, en a même fait l’éloge, comme étant un signe que la politique étrangère française est indépendante de l’influence des États-Unis.

La France tente de justifier sa décision de continuer, mais elle ne parvient pas à convaincre. Une des raisons invoquées sont les emplois. Cependant, ce n’est pas vrai. Un représentant syndical à St-Nazaire (où les navires sont construits) a confirmé que les emplois ne dépendent pas des Mistrals, alors que le directeur de STX, l’entreprise de construction de navires, a dit que leur carnet de commandes est plein jusqu’en 2019, avec une livraison d’un grand navire prévu chaque année jusque là.

Une autre raison invoquée est la réputation. Mais qu’est-ce qui est le plus dangereux en termes de réputation, armer un agresseur et soutenir l’expansionnisme russe ou la rupture d’un contrat afin de préserver la paix, la stabilité et la démocratie sur le continent ?

Dans sa tentative pour justifier la livraison de ces navires, la propagande française prend parfois une tournure ridicule. Par exemple, sur son chemin du retour de l’Ukraine, où il a assisté à l’inauguration de Poroshenko, le ministre des affaires étrangères français Laurent Fabius a déclaré que, tout comme la Russie honore sa signature, la France le fera. Cela a été dit après que la Russie ait violé le mémorandum de Budapest, illégalement occupée de Crimée et commencé de soutenir les terroristes dans le Donbass.

La raison derrière l’obstination de la position française est probablement l’argent. Dans le cas où le contrat est rompu, la France dit qu’elle aura à payer de grosses pénalités. De même, l’annulation du contrat avec la Russie pourrait avoir des effets négatifs sur les exportations d’armes françaises dans le monde. Rappelons que la France est parmi les principaux exportateurs d’armes dans le monde. Derrière les mots, derrière les promesses de protéger la démocratie et la paix, malgré les promesses de soutenir l’Ukraine et autres alliés, malgré le fort engagement contre la prolifération des armes dans le monde, en poursuivant ce contrat avec la Russie, la France montre au monde qu’elle se soucie plus de l’argent que de la paix et des principes démocratiques.

Le crash de l’avion de la compagnie aérienne de Malaisie

Le 17 juillet, les séparatistes soutenus par la Russie, avec l’aide de personnel russe, ont abattu un avion civil avec 298 passagers à bord. Ce nouvel acte terroriste a provoqué une onde de choc dans le monde et à la suite de cette tragédie, certains dirigeants mondiaux tels que Merkel, se sont joints aux protestations en disant que la France ne devrait pas vendre de Mistrals à la Russie. Robert C. O’Brien, un ancien représentant américain aux Nations Unies, a suggéré que les États-Unis devraient utiliser le produit de l’amende de la BNP Paribas à acheter et à armer les Mistrals. Après la tragédie de la Malaysia Airlines, cette affaire est devenue un enjeu majeur, global, affectant la sécurité mondiale.

Espérons que la France, à la lumière de cette tragédie, se rappellera ses principes fondateurs et décidera de chercher de nouveaux clients pour ces navires. Mais en considérant que la France n’a pas bougé pendant tout le temps du conflit ukrainien malgré les preuves de l’implication russe et d’après les commentaires des responsables Français après le crash, qui ont dit qu’ils veulent séparer la tragédie du Boeing du contrat, nous pouvons légitimement craindre que la France n’annule pas ce contrat, même si cette vente a un effet dévastateur sur sa réputation, surtout après cette tragédie.

Que peut-on faire

Si la France n’est pas obligé par le troisième niveau des sanctions ou par ses alliés d’arrêter les exportations d’armes vers la Russie, alors des procédures judiciaires pourraient bloquer ce contrat, car il casse le code de conduite européen sur l’exportation d’armes, qui régit la façon dont les États membres peuvent exporter des armes vers les pays non UE.

Ce code de conduite énumère plusieurs critères que l’acheteur doit respecter afin que la vente soit légale. Pour que la vente devienne illégale, il suffit que le pays de destination viole un seul critère. Toutefois, comme l’a expliqué (http://news.liga.net/news/politics/2463644-prodazha_mistraley_putinu_narushaet_normy_evrosoyuza_ekspert.htm) M. Samus, la Russie a violé 6 de ces critères. Un de ces critères prévoit que l’acheteur doit respecter les droits de l’homme, ce qui n’est pas le cas de la Russie, si nous examinons la façon dont elle traite les journalistes et les opposants politiques. Un autre critère est que l’acheteur doit respecter le droit international, ce qui n’est pas le cas pour la Russie avec l’occupation illégale de la Crimée, le fait qu’elle soutient la guerre dans le Donbass et le fait qu’elle a violé le protocole de Budapest. Un troisième critère est que la vente ne doit pas mettre en danger la sécurité des alliés et des partenaires de la France. La Pologne et les pays baltes ont exprimé des inquiétudes pour leur sécurité, et l’Ukraine est attaquée.

Ce code de conduite est devenue une « position commune » en 2008 (ironiquement sous l’influence française), et par conséquent, en théorie, ce code de conduite est juridiquement contraignant. Ceci a été confirmé par Hervé Morin, alors ministre de la Défense, devant le Parlement français le 2 février 2010 : « la présente position commune constitue un acte juridiquement contraignant, qui ne nécessite pas l’adoption d’une nouvelle législation nationale, il s’impose directement au gouvernement français (…). Ainsi, les décisions de la (CIEEMG) Commission intergouvernementale pour l’exportation d’équipement et de matériel de guerre, quand donne la permission pour l’exportation d’armes, devraient rigoureusement tenir compte des embargos et mesures restrictives en vigueur, sur la base de listes exhaustives et à jour de l’ONU et sur la base des positions communes de l’Union européenne ».

La CIEEMG devrait donc théoriquement appliquer strictement cette position commune et interdire l’exportation des Mistral. Dans le cas où la Commission déciderait d’ignorer la législation européenne, ou dans le cas où la France déciderait de passer outre, en théorie, tout citoyen de l’UE peut poursuivre la France pour avoir enfreint le droit fondamental de l’UE. Selon Sylvie Matelly, une telle procédure serait difficile, mais elle représente un risque pour tout État membre ou toute entreprise portant atteinte à la position commune.

Une autre solution consisterait pour l’Ukraine et les autres États concernés (plus probablement les voisins de la Russie, les États riverains de la mer Noire, les pays baltes, les États-Unis, le Canada et même pourquoi pas le Japon et les alliés dans le Pacifique) d’agir au niveau gouvernemental et de trouver des membres de l’UE désireux de faire pression sur la France pour qu’elle respecte les principes et la législation de l’UE. La pression de la rue et des médias sera également efficace en faisant honte à la France et en poussant les autres gouvernements à utiliser leur influence et les moyens légaux à leur disposition pour arrêter ce contrat.

Malgré tous les efforts Français pour vendre tranquillement des Mistrals à la Russie, ils vont avoir des surprises le long de la route…

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